La pratique artistique de Jérémie Setton se fonde sur une approche hypersensible de la lumière et de la couleur. Sa peinture, qui rencontre l’installation, s’attache à vriller notre perception des formes ou des espaces. Travaillant à la frontière du visible et l’invisible, elle provoque souvent une impression d’étrangeté, quelque chose comme le sentiment d’un infime déplacement d’abord indéfinissable. Contrariant les intensités lumineuses en nuançant avec une parfaite justesse les valeurs chromatiques de surfaces colorées et en les mettant sous une simple lumière artificielle, sa peinture transforme les volumes et fait immanquablement basculer le spectateur dans un entre- deux monde où l’objet et sa représentation semblent se confondre. Le volume devient totalement plan, les ombres disparaissent.
Le titre signifie Lumière rasante. Il fait référence à une technique d’éclairage latéral utilisée en restauration d’œuvres d’art pour révéler en détail la matérialité des surfaces picturales. Dans l’exposition, « Grazing light » ouvre des questionnements plastiques sur la perception des surfaces, des volumes, des images et des couleurs — lorsqu’elle est mise à l’épreuve de la lumière.
À travers son regard « scrutateur », Jérémie Setton nous invite à éprouver la relativité de la perception du réel. En développant pour chaque pièce des mises au point et des points de vue singuliers, il nous fait percevoir de manière sensible l’instabilité du réel. L’artiste superpose le réel et son double, se jouant de l’ambiguïté entre présence réelle et représentation.
Grazing Light (« lumière rasante ») renvoie notamment à une technique scientifique d’éclairage utilisée pour révéler la matérialité et l’histoire des surfaces. À travers son regard scrutateur, l’artiste transforme la lumière en véritable matière, et trouble les frontières entre réel, apparition et représentation.
Grazing signifie aussi effleurer, frôler, et suggère donc une proximité à la fois optique (vision rapprochée) et haptique (de l’ordre du toucher), mais aussi, de manière plus décalée, « brouter » (non sans lien avec l’histoire de la halle, mais aussi avec l’une des œuvres de l’exposition, qui s’apparente à une étendue herbeuse que nous sommes invités à aller « toucher des yeux »).



